Plaidoyer pour une réforme des dictons météorologiques

C’est urgent : le dérèglement climatique nous fait perdre nos repères.

En écoutant ma vieille mère (85 ans, origine très paysanne, et restée les pieds dedans) me tanner encore avec ses dictons météorologiques, et constatant qu’elle ne veut rien entendre quand je lui dis qu’il y a, d’une part toujours eu un dicton et son contraire pour que la sagesse populaire ait toujours raison, et d’autre part, qu’il y a désormais le réchauffement climatique à cause duquel plus aucun dicton n’est valable (pour peu qu’ils le fussent un jour)… je me suis pris d’angoisse pour les parémiologues.

Comme vous le savez (parce que vous le saviez), la parémiologie, du grec πᾰροιμῐ́ᾱ (paroimíā), « proverbe », est la discipline qui a pour objet l’étude des proverbes et expressions apparentées — sentences, préceptes, slogans, devises, etc. — reprises sous le nom de « parémies » https://fr.wikipedia.org/wiki/Par%C3%A9miologie

Voici des gens, les parémiologues qui vont se retrouver démunis, non par la bise venue, mais par le dérèglement climatique puisque le dicton classique ne sert donc plus à rien. Et nous aussi : à quel dicton désormais nous fier ? Tout est chamboulé, imprévisible. Il me paraît donc urgent de créer de nouveaux dictons à l’heure où on se demande s’il ne va pas falloir rajouter des saisons tant pour savoir ce qui va nous tomber de bizarre sur la tronche dans une heure que pour continuer à donner un peu de boulot à ces pauvres philologues en attendant que Météo France, qui ces dernières années a fermé nombre d’agences locales et régionales et viré nombre d’agents, les recrute et les reconvertisse via des stages ou emplois aidés pour affiner ses prévisions devenues plus que jamais erratiques.

Voici donc ma première contribution (dès que je peux aider, je fonce). J’ai créé un certain nombre de « nouveaux dictons » (que je propose modestement d’appeler « néo météo parémies »).

1 – Vaches qui volent, tornade au sol.
2 – Neige de l’été fait ta moisson de surgelés.
3 – Si flotte ton canapé, jardin bien arrosé.
4 – Chaleur en été, il faut te méfier.
5 – Canicule à la Saint-Michel fera fondre les guirlandes à Noël
6 – À grenouilles confites, étang salé.
7  – Si le vent souffle à l’envers, le soleil se couche à l’Est.
8 – Automne sans feuilles mortes, l’hiver tu reportes.
9 – Quand la grêle tombe en cubes, c’est que les nuages jouent aux dés.
10 – Arc-en-ciel en pleine nuit, tes poulets seront précuits.
11 – En août, rosée gelée, enfile un short fourré.
12 – Pingouins dans ton champ n’est pas banquise pour autant.
13 – Si la mer atteint le grenier, du poisson au dîner.
14 – Cigales en février, ta prime PAC doit réclamer.
15 – Incendies de printemps fatigue tôt le pompier.
16 – Rivière à sec confirme le GIEC, rivière en crue, igloo fondu.
17 – Clim en mars, tempêtes éparses.
18 – Typhon du matin fait l’assureur chagrin.
19 – Membre roide ; goutte froide.
20 – Dôme de chaleur craquelle le baigneur.
21 – Pluies diluviennes, les ministres reviennent.

C’est un premier jet qu’il conviendrait de développer et populariser. Chacun peut s’y atteler tant la tâche est vaste. À noter qu’une nouvelle catégorie de dictons (« néo météo parémies corollaires ») serait peut-être à envisager concernant cette fois le fameux ressenti que les dictons de jadis ne prenaient pas en compte. Voire faut-il même aller plus loin en considérant un ressenti du ressenti face aux turbulences qui nous assaillent et à notre perte récurrente de repères. La question peut paraître vertigineuse, mais dans l’urgence climatique on ne peut plus rien écarter.